La ville est à nous AUSSI ! -Article
Depuis 2017, Periferia travaille en collaboration avec la Maison de Quartier des Quatre Vents à Molenbeek sur les questions de mixités dans l’espace public, à partir du regard et du vécu de jeunes filles qui habitent le quartier. Après avoir réalisé un diagnostic du quartier (Étangs noirs/ Gare de l’Ouest), elles ont formulé quelques recommandations à destination de la Commune, des associations du quartier et des usagers du quartier.
Cette page vise à illustrer et donner voix au manifeste rédigé par le groupe.
On y retrouve des éléments de diagnostic sensible réalisé par le groupe, des extraits de podcast permettant une réflexion élargie des constats abordées et des premières propositions afin de prendre en compte les femmes dans l'aménagement et la gestion des espaces publics.
Premiers constats
- Les hommes et les femmes ne semblent pas avoir le même comportement dans la ville
- Les hommes ont plus de droits et d'opportunités que les femmes
- Les hommes sont plus présents en ville, souvent en groupe, tandis que les femmes sont moins visibles et leur présence semble moins légitime
- Les femmes ont plus de tâches domestiques à faire que les hommes
outils pour l'état des lieux sensible du quartier
Aménager des espaces pensés par et pour tou·te·s
Les femmes ont une pratique de la ville spécifique, différente de celle des hommes. Leurs points de vue ne se limitent pas à un ressenti sur les questions d’insécurité mais bien à une vision globale sur l’accessibilité et l’appropriation des différents espaces publics (espaces verts, mobilité, loisirs, propreté...). Dans le quartier, un certain nombre d’espaces publics donnent un sentiment d’inconfort, de malaise.
« Des espaces où l’on passe, que l’on traverse mais où il n’est pas agréable de rester. »
Parce que les espaces publics sont encore peu pensés par et pour les femmes, elles s’y sentent moins à l’aise et donc y passent moins de temps. Prendre en compte et reconnaitre l’expertise d’usage des femmes apparait comme une nécessité pour aménager des espaces où les femmes se sentent bien, qu’elles ont envie d’occuper et de s’approprier !
PROPOSITIONS
- Diversifier l’aménagement des espaces et questionner avec les femmes l’équilibre entre espaces publics « à l’abri des regards » et « visibles de tou·te·s » à l’échelle de chaque quartier, chaque rue
- Aménager des espaces verts et paisibles
- Multiplier (et entretenir) les toilettes publiques gratuites et mettre à disposition des serviettes hygiéniques en libre accès
- Améliorer le confort des piéton·ne·s sur les trottoirs (diminuer la place de la voiture, des terrasses des cafés...)
FORMER AUX MIXITéS
« Les garçons qui ont évolué dans des groupes de maisons de quartier mixtes où on débat, sont différents, plus respectueux car ils comprennent. »
L’expérience des femmes et des hommes dans la ville est différente. Les un·e·s n’ont pas forcément conscience des réalités vécues par les autres.
Les garçons ayant grandi dans des villes où l’espace public est dominé par des hommes n’ont pas forcément conscience des conséquences de certains de leurs comportements (attroupements, regards insistants, interpellations en rue...) et notamment de leurs effets sur la pratique de la ville par les femmes (trajectoires modifiées, stratégies d’évitement, résignations à ne pas sortir...).
PROPOSITIONS
- Multiplier les espaces de débat entre femmes, entre hommes et entre femmes et hommes :
- dès le plus jeune âge
- partout (au sein des maisons de quartier, des écoles, des espaces sportifs...)
2. Analyser avec les lunettes du genre les programmes d’activités proposées au sein des maisons de quartier, des centres sportifs...
« Il faut tout bousculer ! »
SE RENforcer entre les femmes
« Quand on est toute seule on est gênée, quand on est en groupe on est plus fortes... Être en groupe, ça nous a protégé ! »
On constate dans le quartier un manque d’espaces pour se retrouver entre femmes tant dans l’espace public que dans des locaux.
Cela limite d’une part les possibilités de sociabilisation mais également les moments pour se renforcer, discuter des enjeux du quartier...
Les espaces entre femmes permettent d’avoir une parole libre, d’échanger sur des expériences vécues sans devoir se justifier mais aussi de se rendre compte de la dimension collective du problème, que l’on n’est pas seule à subir cette discrimination.
PROPOSITIONS
- Créer des espaces pour prendre le temps de se renforcer entre femmes
- Encourager des projets associatifs à destination des femmes pour renforcer les capacités en vue de créer des espaces en mixité
- Encourager les activités à l’extérieur pour se rendre visible entre femmes
- Occuper en groupe les espaces publics et de décisions pour affirmer sa présence
- Encourager la mobilité hors du quartier
Développer le sport pour tou·te·s
On constate aujourd’hui que les terrains et infrastructures sportives sont principalement utilisés par des hommes.
« Y’a que des garçons qui jouent, c’est bizarre si on vient comme ça on s’incruste. On va dire qu’est-ce que tu fais là ? ça va être gênant... »
L’analyse budgétaire sous l’angle du genre montre que les investissements d’équipement de loisirs se font en majorité à destination des jeunes hommes : terrains multisports, skatepark... Se pose alors la question du partage de l’espace public et du droit aux loisirs pour les femmes.
PROPOSITIONS
- Offrir tant des créneaux réservés aux femmes que des programmes qui incitent à la pratique du sport en mixité
- Diversifier les sports et loisirs proposés au sein des équipements sportifs
- Inviter les femmes et filles du quartier pour penser l’aménagement des équipements sportifs (rues par lesquelles on accède aux bâtiments, emplacement des vestiaires...)
- Repenser la place et la taille donnée aux équipements généralement utilisés par des garçons (terrains de football, de basket...situés au centre des places, cours, espaces sportifs)