Urbanisme, féminisme et empowerment. Regards croisés Amérique latine et France

Entretien avec la chercheure Marie-Dominique de Suremain. Elle est urbaniste sociologue et coordinatrice d'un programme européen aux politiques publiques égalité et genre pour l'Amérique latine.

Elle est spécialiste en recherche-action participative en genre et développement durable. Dans cet entretien, elle revient notamment sur la notion d'empowerment et de son influence dans son travail.

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Sport entre filles

Retour sur une expérimentation scolaire en Suisse.

"Face aux inégalités de sexe à l’école, une expérience en éducation physique et sportive montre que, pour les élèves, pratiquer en non-mixité dégage des marges de manœuvre par rapport aux normes de genre, sans pour autant les enrayer complètement.

À l’échelle internationale, face au maintien des inégalités entre les sexes à l’école, la mixité dans les établissements scolaires refait débat. Dans différents pays (Canada, Corée du Sud, Australie, États-Unis), le retour de la non-mixité est considéré comme une des stratégies susceptibles d’offrir les mêmes chances et opportunités aux filles et aux garçons. Aux États-Unis, depuis le vote de la Single Sex Regulation (2006), le nombre d’écoles et de classes qui séparent filles et garçons s’est multiplié, aussi bien dans l’enseignement privé que public. En Europe, sous l’impulsion notamment de l’European Association of Single-Sex Education (EASSE), la non-mixité est présente en Angleterre, en Irlande mais aussi en Espagne et en Suisse, où des expériences pilotes se sont développées. Parfois qualifiée de nouvelle option pédagogique, parfois décriée et plutôt vue comme une régression, la séparation des sexes à l’école s’accompagne de nombreuses controverses.

À partir d’une enquête qualitative par entretiens et observations (Bréau 2018) conduite auprès d’adolescents et d’adolescentes (14-15 ans) scolarisés dans des classes d’éducation physique et sportive en Suisse romande, cet article vise à saisir les effets de la non-mixité sur la formation des élèves. En se rattachant à l’approche du « doing gender », qui définit le genre comme une action (West et Zimmerman 1987), l’objectif de ce travail était de repérer des manières de « faire le genre » chez les élèves afin de questionner l’évolution des normes de masculinité et de féminité en contexte non mixte."

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Genre et aménagement de l’espace public : quels enjeux pour l’égalité ?

Elise Vinet est professeure d'université en France à Lyon 2. Elle est spécialisée dans les enjeux d'égalités des genres et les questions liées aux politiques publiques.

Elle est venue présenter ses travaux sur le genre et l'espace public lors d'une journée de séminaire organisée par le centre de recherche METICES de l'ULB.

Ce centre de recherche regroupe une quarantaine de chercheur·es qui travaillent sur les thématiques suivantes : migration, espaces, travail, institutions, santé et citoyenneté.

Vous trouverez ici la présentation power point qu'elle a réalisée pour l'occasion.

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Femmes et espaces publics

"Lorsque l’on parle d’espaces publics et de la place des femmes en leur sein, on ne considère que trop souvent la rue. Nous avons choisi, dans ce rapport, d’entendre le terme dans toute sa diversité. Il s’agit bien des « endroits accessibles au(x) public(s), arpentés par les habitants, qu'ils résident ou non à proximité », mais pas seulement.

Il s’agit également des transports, publics ou non, et de leurs emprises, espaces au sein desquels la population française passe en moyenne une heure par jour, 1h30 pour les Franciliennes et Franciliens !

Les espaces publics, ce sont également les équipements publics comme les lieux de loisirs ou les écoles, qui ne sont certes pas accessibles à tous, mais demeurent des lieux où les enfants, adolescents et adolescentes apprennent ce qu’est le partage d’un espace en commun.

Pour répondre à tous ces enjeux, il nous est apparu nécessaire de croiser les expertises : celles des chercheurs, chercheuses et universitaires, des associations, des personnes de terrain. Nous avons donc, en partenariat avec l’association spécialisée Genre et Ville, organisé une série de rencontres publiques sur chacune des trois thématiques, pour recueillir les témoignages de chacun et chacune, pour s’inspirer de ce qui fonctionne, ou non, des expérimentations passées ou en cours. Nous avons également tenu à documenter les expériences non-franciliennes par des visites d’études à Bordeaux ainsi qu’à Bruxelles. Enfin, nous avons tenté de nous baser sur des sources variées, universitaires, administratives, statistiques, etc. Les références de ces ressources, humaines ou écrites, sont disponibles en annexe."

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Les femmes dans le nom des rues bruxelloises

"Il est désormais admis que l’espace urbain n’est pas neutre et qu’il est marqué par les hiérarchies et les multiples inégalités qui traversent la société [Clerval et al., 2015] : les rapports sociaux de sexe, comme les rapports de classe ou de race, se matérialisent dans la ville, la transformant en espace symboliquement signifiant. Ainsi, des controverses récentes relatives à l’attribution du nom des rues, suscitées par des organisations féministes à Bruxelles et dans le monde, ont mis en lumière le caractère genré, notamment, de l’odonymie urbaine, c’est-à-dire des noms portés par les voiries d’une ville [Badariotti, 2002]. L’espace viaire met généralement en valeur des personnages masculins et bourgeois [Dobruszkes, 2010], révélant la force d’une tradition sociopolitique du culte des « grands hommes » [Sniter, 2004] qui, dans le paysage toponymique, laisse peu de place aux femmes, aux classes populaires [Steffens, 2007] ainsi qu’aux minorités ethniques [Jacobs, 2018] et sexuelles.

L’enquête présentée ici a été réalisée par une équipe d’enseignant·e·s et d’étudiantes de l’Université libre de Bruxelles, dans le cadre d’un séminaire intitulé « Genre et Ville » entre février et avril 2020. Ces informations proviennent d’un relevé systématique des odonymes, de recherches documentaires, d’observations in situ et d’entretiens menés avec des élu·e·s ou des fonctionnaires des différentes communes bruxelloises. L’étude ne vise pas à retracer l’histoire de l’attribution des noms de rues ou à en présenter une analyse morphologique, mais à proposer, à partir d’un relevé exhaustif des noms de voiries dans la Région de Bruxelles-Capitale (ci-après RBC), un panorama quantitatif des odonymes féminins et masculins ainsi qu’une analyse qualitative des pratiques des autorités communales en matière de dénomination des rues. L’objectif est de saisir ce que la part négligeable des anthroponymes féminins révèle des rapports sociaux de sexe inscrits dans l’espace urbain et de déchiffrer ce que ces « noms de rue disent de la ville » [Bouvier, 2007]."

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Stéréotypes de genre dans la pratique de l’urbanisme

"Dans les pays démocratiques, l’aménagement du territoire est censé obéir au principe de la justice pour tous. Ce point de vue a été critiqué au motif que tous (toutes) ne partent pas sur la même ligne dans la société. Durant les années 1990, des chercheuses et urbanistes féministes en Europe commencent à prendre conscience de l’absence des femmes dans la conception du projet urbain et ensuite à développer des méthodes pour remédier à cette lacune. Les travaux sur le genre en urbanisme ont souvent considéré les « femmes » comme un groupe cible, une catégorie supplémentaire ayant des besoins particuliers. Vingt-cinq ans plus tard, les problématiques concernant le genre en matière de planification urbaine sont mieux connues. De nouvelles approches ont été élaborées et mises en œuvre dans des cadres expérimentaux, bénéficiant de financements exceptionnels ou de collaborations institutionnelles. Certains éléments issus de ces recherches ont influencé la pratique dominante de l’urbanisme.

Depuis 1999, la plupart des pays de l’Union européenne adhèrent aux directives de l’Union concernant l’égalité des sexes (Treaty of Amsterdam, voir Encadré 2). Cependant, le potentiel d’un urbanisme qui prendrait en compte la dimension du genre demeure encore très sous-estimé, comme l’ont montré entre autres Gemma Burgess [2008] pour l’Angleterre, Anita Larsson [2006] pour la Suède. Cela est dû, en partie, à la lenteur du processus de dévelop- pement urbain. Par ailleurs, il existe une tension intrinsèque dans des propositions qui définissent « les femmes » comme un groupe cible mais qui produisent des outils qui omettent de s’attaquer aux forces structurelles qui perpétuent et reproduisent les normes de genre.

Pour comprendre les stéréotypes de sexe liés au système de genre dans la planification urbaine et aux a priori implicites qui peuvent conforter les rôles liés au genre dans la conception de la ville, il faut étudier des documents d’urbanisme – rapports, statistiques, plans, notes techniques – afin d’analyser leur langage et leurs symboles. Cet article s’intéresse à la mise en évidence de codes sexués dans la pratique de l’urbanisme ; par exemple, il faut expliciter comment les catégories urbaines, comme la densité, la mixité ou l’aménagement routier, ont un effet sur les services, la sécurité et l’accessibilité qui ne sont pas égaux pour différents groupes d’usagers [Tummers, 2010]."

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Des villes pour toutes et tous

"En 2015, une étude menée par Marie Gillow révèle que les déplacements des femmes dans la région bruxelloise sont emprunts de stratégies d’adaptation et d’éviction pour faire face à un sentiment d’insécurité. À Paris, en 2017, elles sont 65% à éprouver ce sentiment. Rue trop sombre, chemin trop étroit, manque de fréquentation diversifiée, manque de présence féminine, présence d’agresseurs potentiels, harcèlement sexuel... beaucoup de critères qui laissent percevoir les espaces publics comme peu accueillants voire dangereux pour les femmes.

Depuis toujours, la ville reflète des normes sociales de genre qui tendent à perpétuer une « ségrégation sexuée » des espaces et à attribuer des rôles et des places différentes et hiérarchisées aux femmes et aux hommes. Cette différenciation produit des rapports de force et des inégalités de genre au sein des espaces urbains.

Les femmes utilisent les espaces publics pour des raisons statistiquement plus diversifiés que les hommes puisqu’elles sont encore majoritairement en charge de l’espace domestique, du soin, de l’accompagnement des enfants et des personnes âgées. Cependant, au quotidien, elles font face à de nombreuses problématiques lorsqu’elles se retrouvent dans ces espaces : lieux non adaptés à leurs besoins, violences, harcèlement de rue... Il leur est constamment rappelé que l’espace public est dangereux et non construit pour elles. Mais comment se fait-il qu’aujourd’hui encore, les hommes et les femmes s’approprient et investissent les espaces publics d’une manière différente ?

Les politiques d’urbanisme et d’aménagement de l’espace public sont rarement soumises à une analyse genrée. Cette absence d’analyse empêche la visibilité des inégalités femmes-hommes et entraîne la création de politiques urbaines basées sur un modèle masculin d’organisation de la vie quotidienne. Ainsi, les problématiques et besoins spécifiques des femmes ne sont pas pris en compte, ce qui a tendance à renforcer les inégalités existantes. Comment construire des espaces publics plus accueillants pour tou.te.s ? En quoi l’approche genrée entraine des répercussions positives sur le sentiment de sécurité et l’appropriation de ces espaces ? Comment aboutir à une réelle mixité des espaces publics pour garantir l’accessibilité pour tou.te.s et le vivre ensemble ?"

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Feminist approaches to habitat

Podcast du réseau Habitat international coalition (HIC). Le podcast est en anglais.

"Comment les membres de HIC et leurs alliés apprennent-ils à travers la région à renforcer leurs capacités de plaidoyer collectif sur les approches féministes de l'habitat ?

Pendant six mois, dans le cadre d'un processus d'apprentissage mutuel facilité, les membres du HIC se sont réunis pour discuter et apprendre les différentes manières et stratégies que les femmes du monde entier ont développées pour protéger et revendiquer leurs droits au logement et à la terre, ainsi que pour établir des liens sur la manière de les développer et de les compléter.

Toutes ces expériences et tous ces apprentissages seront désormais disponibles dans une série de podcasts qui sera diffusée au cours du mois de mars, afin d'inciter un plus grand nombre de personnes à participer à ce voyage d'apprentissage.

Les podcasts de l'espace de co-apprentissage sur le plaidoyer à plusieurs niveaux et de l'espace de co-apprentissage sur les droits fonciers seront bientôt disponibles."

Source : site internet de HIC

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La mobilité des femmes, une revue de littérature

Forum "Vies mobiles"

"Le Forum Vies Mobiles est un institut de recherche sur la mobilité qui prépare la transition vers des modes de vies plus désirés et durables.

Depuis des siècles, on attribue aux femmes et aux hommes des caractéristiques et des rôles sociaux différenciés : les femmes ont été associées à la gestion du foyer et des enfants et à la sphère privée, tandis que la sphère publique était plutôt l’apanage des hommes. Ces rôles sociaux différenciés s’accompagnent d’un rapport de pouvoir favorable aux hommes. Le Forum Vies Mobiles a voulu en explorer les conséquences sur leur mobilité à travers une revue de la littérature traitant de la mobilité des femmes. Ce travail s’appuie sur des références françaises et internationales."

Source : site internet du Forum Vies mobiles

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L’approche égalitaire de l’urbanisme. Outils et méthodes pour garantir l’accès à la ville pour tou·tes

L’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) est un établissement public industriel et commercial (EPIC). Elle finance et accompagne la transformation de quartiers de la Politique de la ville dans toute la France.

"Inauguré en 2020, le groupe de travail consacré à l’approche égalitaire de l’urbanisme a dû s’adapter aux nécessités liées à la crise sanitaire : une première séance de travail s’est tenue en février 2020, tandis que les suivantes ont été annulées en raison des mesures de confinement. Le cycle de travail a donc été arrêté prématurément.

À la suite, il a été décidé de poursuivre la réflexion par un premier travail exploratoire et de synthèse visant à rassembler les clés méthodologiques fondamentales, nourries d’expertises et de contributions d’acteurs ciblés, qui donne lieu au présent Carnet de l’innovation.

Ce document constitue à la fois un guide méthodologique et un recueil d’expériences à destination des porteurs de projets de renouvellement urbain, désireux de favoriser les projets égalitaires grâce à leur PRU, ainsi qu’à tou·tes leurs partenaires. Il est construit de la manière suivante :

  • Des fiches thématiques détaillant les points clés pour concevoir des quartiers égalitaires;
  • Des fiches projets illustrant les différentes approches méthodologiques, menées dans des contextes territoriaux différents, pour retours d’expérience et inspiration;
  • Des annexes : annuaire des membres du groupe de travail et des contributeurs, ressources bibliographiques."

 

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Genre et participation – Institut de la Concertation et de la participation citoyenne

"Institut de la concertation et de la participation

Les dispositifs participatifs ambitionnent de toucher, sans discrimination, un large public. Or, le constat est souvent fait que les femmes, qu’elles soient élues, participantes ou animatrices, n’y trouvent pas une place égale à celle des hommes.

Au sein de l’ICPC, de nombreuses personnes tentent de favoriser une plus large inclusion en particulier en termes de genre.

Ce cycle de rencontres vise à partager des connaissances concernant l’état des lieux mais aussi des expériences et pratiques face aux inégalités de genre dans les démarches participatives ou de concertation.

  • Aujourd’hui, quelle est la part des femmes et des hommes dans les temps participatifs et quel est leur poids dans les produits de la participation ?
  • Quels indicateurs peut-on mobiliser pour les mesurer ?
  • Les dispositifs reconnaissent-ils une plus grande variété de genre au delà de la distinction binaire femme/homme ?
  • Quels liens avec d’autres formes d’inégalités de participation observées ?
  • Des dispositifs spécifiques sont-ils plus propices à l’égalité de genre ?
  • Cette perspective conduit-elle à des changements de pratiques ?"

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La place des femmes dans l’espace public. Seulement une question d’aménagement du territoire ?

"Officiellement, se déplacer dans l'espace public est accessible à tout le monde de manière égale. Tout le monde a un accès libre aux rues, transports en commun, espaces publics. Mais comment les femmes se retrouvent-elles dans cette mobilité qui paraît à première vue égalitaire? Quelles implications pour la vie quotidienne, l'emploi, la participation citoyenne ? Un regard genré sur ces questions va bien au-delà d'un réaménagement du territoire...

La ville a un genre en ce sens qu'elle joue un rôle dans les rapports sociaux femmes/hommes, elle participe aux rapports de pouvoir en donnant accès ou non aux différentes sphères de la vie en société.

La compréhension de la ville peut être abordée aujourd’hui de façon transversale par l’identification d’enjeux comme la domination masculine et l’émancipation sexuelle de différentes tutelles, depuis la sphère de l'intime jusqu’à la régulation politique des espaces publics. Il s'agit de repousser les limites c'est à dire de politiser ces questions. « Dire la rigidité des assignations de genre et lutter pour l’estomper dans les lieux publics, c’est changer, avec la ville, la vie sociale dans son ensemble. C’est modifier les rapports de force, les rôles sociaux, l’intimité, la vie familiale, les formes de pouvoir. C’est s’inscrire fondamentalement dans un projet politique global et non pas seulement proposer des politiques publiques urbaines. »"

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Être une femme dans une ville d’hommes

"La ville appartient aux hommes, nous apprennent sociologues, historiens et géographes. La plupart du temps, elle est conçue pour rappeler aux femmes que leur place est ailleurs. Au foyer. À la sortie des écoles. Les lieux publics, même les plus visibles, même les plus symboliques, sont très souvent monopolisés, en nombre, par ces messieurs. Vous en doutez ? « Wilfried » est allé compter."

Extrait du numéro 16 du magazine belge Wilfried.

Source image : site internet de Wilfried

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Vers un droit à la ville féministe : les expertes de la ville…les usagères

"Depuis quelques années les féminismes se sont invités dans les débats architecturaux et urbanistiques. Loin d’être une vision monolithique de ce que devrait être l’espace urbain, l’architecture et l’urbanisme féministes appellent plutôt à partir des usages et des pratiques des habitant·es pour construire une ville plus égalitaire.

En 1968, Henri Lefebvre publie Le Droit à la ville. Il y relève que l’espace est à la fois le produit des rapports sociaux et lieu de leur reproduction. Penseur critique marxiste, il replace les enjeux urbains dans une perspective sociale et politique qui jusqu’alors avait été laissée à la discrétion des techniciens et spécialistes (les urbanistes), de l’État (le gestionnaire) et des acteurs économiques capitalistes. Il appelle à s’emparer de ces enjeux pour se réapproprier la ville par la construction d’un débat public et d’un savoir scientifique à partir des usages, et par l’appropriation physique et l’autogestion de la ville.

Depuis, les mouvements féministes se sont saisis de la question urbaine et ont souligné les dimensions genrées de la ville construite par et pour les hommes".

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L’égalité sous conditions

Podcast

"Le premier épisode de l’émission mensuelle « Le genre en ville » questionne la mise en œuvre du principe républicain d’égalité en France. La politiste Réjane Sénac souligne comment son application se fait « sous conditions », sans réussir à endiguer les inégalités et les dominations de genre."

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Source : site internet de Métropolitiques

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La ville faite par et pour les hommes

"Des noms d'hommes sur les plaques à tous les coins de rues. Des loisirs qui profitent en priorité aux garçons. Des offres de transport insensibles aux spécificités de genre. Sans oublier la culture du harcèlement.La ville se décline surtout au masculin. Plusieurs études récentes le confirment. L'auteur décrit comment la cité renforce les inégalités entre les femmes et les hommes et en crée de nouvelles, et montre qu'il est possible de la rendre plus égalitaire.L'usage de la ville est mixte, et travailler sur le mieux vivre des femmes, n'est-ce pas travailler pour tous ?"
Vous pouvez vous procurer cet ouvrage d'Yves Raibaud en librairie.

Villes féministes, notes de terrain

"À qui appartient la ville ? Sûrement pas aux femmes. Souvent le théâtre des violences, la ville repose sur des fondations sexistes. Kern s’attarde à la manière dont les relations de genre, de classe, de race et d’âge se déploient dans la ville. Elle nous invite à redéfinir et à nous réapproprier les espaces urbains. Comment rendre nos villes plus féministes ?

Partant de son expérience quotidienne de citadine à différentes époques de sa vie (enfant, adolescente, étudiante, travailleuse, militante et mère), elle s’appuie sur les théories d’urbanisme,  des travaux de géographes féministes et des références à la culture pop pour montrer comment une ville genrée qui s’embourgeoise exclut les populations marginalisées, mais également pour évoquer les possibles configurations d’une ville plus inclusive."

 

Pour vous procurez cet ouvrage de Leslie Kern, rendez-vous en librairie.

Periferia rejoint l’édition namuroise du Musée du capitalisme

Pour accéder au programme complet, cliquez sur l'image !

Du 12 février 2024 au 28 mars 2024, le Musée du capitalisme dépose ses bagages à la bibliothèque universitaire de Namur, la BUMP.

Periferia et une vingtaine d’autres associations se sont rassemblées pour vous proposer une édition qui marque le coup pour les 10 ans de l’exposition. En plus des visites, chaque association vous propose une multitude d’activités : des ateliers, des conférences, des débats, des films…

 

Quatre ateliers gratuits et ouverts à toustes, organisés dans les locaux de la FUCID (Rue Bruno 18 à Namur) :

 

  • “Le budget de ma commune, je veux y voir clair !  ”, le 21 février de 18h à 20h30

Une soirée ouverte à toustes pour comprendre le principal outil de décision financière : le budget communal. Comment ça marche ? Qu’y trouve-t-on ? Comment y lire des priorités politiques ? Quand et comment puis-je l’influencer ?

Tout le monde est bienvenu ! Il n’y a pas de notions spécifiques à connaitre avant la rencontre. On abordera ce sujet de manière ludique… Pour ne plus jamais se dire : j’y comprends rien, ça me concerne pas !

 

  • “Des Budgets Participatifs pour renforcer notre démocratie, c’est possible en Belgique ? ” le 14 mars de 18h à 20h30

Partout dans le monde, les Budgets Participatifs sont des outils extraordinaires pour réimpliquer les citoyen·nes dans les décisions financières publiques et renforcer la démocratie. Pourtant, en Belgique, il est rarement utiliser comme tel… Pourquoi ? Comment renforcer ces dispositifs ? Comment oser aller plus loin? Qu’est-ce que je peux demander à ma commune d’améliorer dans le dispositif actuel ? Je veux en savoir plus !

 

  • “Quand les citoyen·nes se mêlent de ce qui les regardent”le 27 mars de 18h à 20h30, avec le CNCD-11.11.11

Après 5 semaines d’exploration thématique au musée, on fait le bilan ! Vous êtes étonné·es, révolté·es, pertubré·es par ce que vous avez découvert dans le cadre des activités du musée ? Ou au contraire, vous en ressortez inspiré·es, enthousiastes, motivé·es pour inverser les tendances ? Vous avez envie de savoir comment des ciotyen·nes comme vous agissent et luttent ici et ailleurs ?
Venez partager vos réflexions et découvrir les capacités d’agir et de reprendre le contrôle en tant que citoyen·nes…en s’inspirant d’exemples d’ici et d’ailleurs à travers le monde.

Pour retrouver le programme complet, rendez-vous sur la page Facebook dédiée à l'évènement. Cliquez sur l’image ci-dessus !

Pour de nouveaux droits politiques

Depuis toujours, Periferia défend un projet de société plus participative et inclusive, en cherchant à faire reconnaitre les expertises citoyennes et à rééquilibrer les pouvoirs d’influence de celles et ceux qui sont éloignés des espaces de prise de décisions. Elle a tenté de promouvoir l’implication des citoyennes dans les décisions impactant la manière de fabriquer la ville (via notamment les contrats de Quartiers Durables à Bruxelles), l’accès au droit au logement et d’habiter la ville (via notamment les Community Land Trust), la gestion des finances publiques (via les budgets citoyens et participatifs). Force est de constater que ces innovations, si elles sont saluées par de nombreuses institutions publiques et organisations de terrain, ne peinent à se traduire en nouvelles politiques publiques. Ces initiatives restent à la marge, à côté du système politique, sans parvenir à le faire évoluer ou l’imprégner (dans le politique).

Depuis 2022, à la sortie de la crise sanitaire qui a ébranlé nos démocraties, Periferia, portée par des énergies citoyennes, s’est donc engagée dans des processus plus radicaux visant à faire évoluer notre système de représentation démocratique. D’abord en soutenant l’instauration d’assemblées citoyennes parlementaires, via le collectif CaP Démocratie (Citoyen·ne·s au Parlement) ou encore Agora Brussels. Aujourd’hui, en s’engageant auprès de cinq autres collectifs et associations pour revendiquer l’inscription de nouveaux droits politiques. au sein de notre constitution.

Cette analyse, co-écrite avec ces partenaires, revient sur les raisons de ce combat et explicitent les opportunités de la prochaine révision constitutionnelle sur lesquelles il est important de rebondir.

« Il est temps de changer la constitution ! »

Cela passe par une intégration des citoyen·nes dans la construction de la décision politique. De nouvelles pistes seraient ainsi offertes pour renforcer l’adhésion de la population à l’action démocratique et politique.

Cela implique une adaptation de la Constitution. Écrits il y a deux cents ans, dans un contexte historique spécifique, certains de ces articles - et notamment ceux qui concernent la relation entre la Nation et la population - n'ont pas évolué et doivent être revus pour permettre aux habitant·es de notre pays de peser sur les décisions autrement que par un vote tous les 5 ans.

Pour y arriver, le gouvernement actuel doit ouvrir à la révision les articles à propos duquel les élu·es de la prochaine législature pourront discuter. Ce texte explique pourquoi nous souhaitons ces changements et vous invite à signer un appel auprès du gouvernement afin qu’il ouvre les articles qui règlent les possibilités d’actions des citoyen·nes dans la prise de décisions.

Nous souhaitons que cette révision soit faite pour et avec les citoyen.ne·s. Nous proposons donc que soit ouvert entre autres l’article 195 pour que les citoyen·nes soient intégrés dans un processus collaboratif impliquant les institutions et la population.

Moderniser la Constitution pour répondre aux enjeux actuels

L’année 2024 va être marquée par des élections à tous les niveaux en Belgique (communal, provincial, régional, fédéral et européen). Pour les distrait·es, cochez dès à présent le 9 juin et le 13 octobre dans vos agendas.

La Constitution a été écrite pour donner une base à la nation belge en 1831 et réécrite pour lui donner une forme fédéraliste. Elle participe de notre identité de citoyen·ne en nous donnant des droits et des devoirs, même si nous sommes peu nombreux·ses à l’avoir lue, voire parcourue. Et si elle donne des droits politiques individuels (voir l’article 61), elle reste un impensé pour construire collectivement un modèle politique durable adapté aux réalités de la société en 2024 et dans les prochaines décennies.

Repenser la Constitution est donc une nécessité, pour la rendre plus lisible et plus mobilisable par la population. Avant chaque scrutin fédéral, le gouvernement en place a la possibilité d’« ouvrir à la révision1 » des articles de la Constitution. Seuls ces articles pourront faire l’objet d’une modification lors de la législature suivante, en cas d’accord d’une majorité renforcée. Une communication doit être faite à propos de cette liste d’articles, avant les élections. La liste des articles est donc un enjeu politique qui doit être débattu ouvertement afin que l’électeur·rice puisse tenir compte de ces échanges au moment de son vote2.

C’est pourquoi nous vous invitons à soutenir notre démarche de soumettre au gouvernement une demande de révision de certains articles, dans le but de faire passer notre démocratie de l’ère des calèches et des crieur·ses de rue à celles des trams électriques et de l'information mondiale et à toute vitesse.

Des articles à réviser

Si nous ne bougeons pas aujourd’hui, le risque à terme sera que les citoyen·nes, déjà méfiant·es, atteignent un tel niveau de déception qu'ils et elles se détournent totalement de ces dispositifs et du monde politique.

Or, réviser la Constitution en Belgique est un processus complexe. Pour que nos élus et élues puissent discuter et voter des réformes constitutionnelles sous la prochaine législature 2024-2029, les articles à discuter doivent être ouverts à révision au printemps 2024 !  Si ce n'est pas le cas, aucune réforme constitutionnelle ne pourra être discutée  pendant 5 ans et ce sera encore une fois le statu quo !

Nous proposons donc d'ouvrir les articles nécessaires pour impliquer les citoyen·nes dans la prise de décision que ce soit à travers des assemblées citoyennes permanentes, de consultations, préférendums, référendums à tous les niveaux de pouvoir, du fédéral au communal. Enfin, il nous apparaît également indispensable que ces moyens de démocratie plus directe puissent être mobilisés aussi bien par les acteur·rices politiques que par les citoyen·nes, via par exemple le droit de pétition.

Nous proposons donc d’ouvrir à la révision :

  • L’article 28 afin de renforcer le droit à la pétition et de conférer un nouveau droit à la participation politique ;
  • L’article 33 afin d’en faire une déclaration de principe compréhensible et inclusive ayant pour centre d’attention le·la citoyen·ne3 ;
  • Les chapitres 1 et 2 du titre III qui concernent le Parlement fédéral, afin d'associer plus étroitement les citoyens dans l'adoption des lois ;
  • Le chapitre 4 du titre III qui concerne les parlement des régions et des communautés, afin d'associer plus étroitement les citoyens dans l'adoption des décrets et des ordonnances. Il convient d’y ajouter les articles 39bis et 39ter pour les consultations populaires. Une révision de l'article 118 permettrait de renforcer l'autonomie constitutive des communautés et des régions et leur offrir plus de latitude pour mettre en place des processus participatifs plus ambitieux ;
  • Les articles 41 et 162 afin de donner une capacité d’action aux citoyen·nes à l’échelon communal et provincial ;
  • l’article 195 pour davantage associer la population aux choix constitutionnels à opérer ;

Cette liste est proche de celle proposée suite à des échanges au sein de la Chambre en 20194. Dans la séance du 4 avril 2019, Laurette Onkelinx a tenu ces propos, qui 5 ans plus tard, prennent une réalité encore plus grande : “La Constitution doit évoluer pour moderniser sa démocratie mais aussi se protéger des visées séparatistes et des opposants à la démocratie5.

Pour institutionnaliser l’action citoyenne

L’utilité de la révision de la Constitution est d'institutionnaliser la participation des citoyen·nes dans la prise de décision politique et de la rendre permanente6. Ce serait une reconnaissance de l’évolution de la norme démocratique et l'affirmation plus forte des droits politiques des citoyen·nes.

Aujourd’hui, la mise en place de processus de consultation de la population ne garantit pas que les élu·es politiques en suivront les conclusions. Cette campagne est également un moment de mobilisation de citoyen·nes pour qu’ils et elles puissent affirmer leur envie d’être impliqué·es et d’avoir un impact dans les décisions qui influencent leur vie.

Inviter la population à redessiner sa Constitution

Ce changement de la Constitution, nous l’appelons pour et par celles et ceux qui la vivent au quotidien. Il est dès lors également indispensable que :

-    Les changements ne viennent pas uniquement des élu·es politiques et ne soient pas imposés aux citoyen·nes. Tant l’Etat que les groupes de recherche/think tank - même si leurs intentions peuvent être bonnes - ont démontré une certaine tendance à créer des systèmes trop complexes pour être adaptés et adoptés par les citoyen·nes ;

-    Les changements impliquent celles et ceux qui vont en vivre les effets.

C’est pourquoi nous plaidons aussi pour que, lors de la prochaine législature, soit mis en place un dispositif impliquant la population dans toute sa diversité.

Les élu·es et les partis regrettent régulièrement la méfiance et le désinvestissement de la population. Mais, ne sont-ils·elles pas en partie la cause de ce dédain ? Souvent au nom de l’efficacité, n’ont-ils·elles pas réduit ou dévitalisé les lieux d’interaction et de concertation ?7

L’article 195 de la Constitution en rend difficile toute modification, voire empêche d’en faire un moment de mobilisation et d’échange avec une population souvent gardée à l’écart de discussions, jugées trop complexes et techniques pour elle. Et ce, alors même que les initiatives récentes d’assemblées ont démontré la sérieuse implication dont les citoyen·nes font preuve quand on leur en donne l'opportunité et le caractère raisonnable, voire ambitieux, de leurs recommandations.

Fort·es de cette expérience, nous proposons, lors de la prochaine législature d’initier un processus qui permette aux différents corps d’interagir et de délibérer à propos des évolutions nécessaires à notre constitution et système démocratique.

Pour paraphraser Clémenceau, « la constitution est une chose trop grave que pour la confier uniquement à des politiques8 ». Invitons donc chacun·e à se saisir de ce texte fondamental.

Tirer parti des expériences d’ici et d’ailleurs

Une expertise s’est développée en Belgique. Nous sommes convaincu·e·s que les autorités fédérales, en concertation avec les différents niveaux de pouvoir mais aussi la société civile et le monde académique, pourraient mettre en place un processus porteur intégrant l’ensemble de notre pays et d’en faire un exemple de délibération inclusive.

Notre pays est reconnu depuis plus d’une dizaine d'années comme un laboratoire de l’expérimentation démocratique. Depuis le G1000 en 2011 se sont développées de nombreuses initiatives publiques comme le dialogue citoyen permanent initié en Communauté

germanophone, les commissions délibératives (en Région wallonne et de Bruxelles-Capitale) et l’Assemblée citoyenne pour le climat en Région Bruxelles-Capitale. Ces initiatives ont en commun, outre le tirage au sort, d’être consultatives. Elles n’ont pas d’impact direct sur la création ou la modification de textes législatifs.

Des mouvements ont voulu contourner cette limite à l’échelle locale9 ou régionale10 en présentant une liste dont un·e éventuel·le élu·e deviendrait porte-parole d’une Assemblée citoyenne10. Avec sa voix, il·elle aurait un pouvoir législatif conditionné directement au fruit d’une délibération citoyenne.

D’autres mouvements du renouveau démocratique militent pour d’autres types de processus comme le référendum d'initiative citoyenne, la transparence dans la prise de décision, le décumul des fonctions, le renouvellement plus régulier ou la limitation des mandats électifs…Tous se trouvent confrontés tôt ou tard aux limites imposées par notre Constitution.

Des expériences vécues en Irlande ou en France ont démontré la capacité des citoyen·nes à s’inscrire dans des processus visant à créer en commun des normes, de manière très rationnelle et raisonnée.

Le cas irlandais est exemplaire par la capacité qu’il a eu à combiner outil délibératif et mobilisation du plus grand nombre, dans une séquence mobilisant successivement les effets positifs de la démocratie délibérative et de la démocratie directe12. Une convention constitutionnelle a été mise en place dans un moment de forte remise en cause de la légitimité de l’action politique. Un groupe de 66 personnes tirées au sort et de 33 élu·es ont reçu pour mandat de présenter des recommandations pour réviser certains articles de la Constitution : son rôle est consultatif et propositionnel, mais non décisionnel. Il est acté que certaines de ces recommandations de réformes feront l’objet d’un référendum, notamment afin de dépasser des blocages d’ordre politique. À l’issue de chaque session, la Convention rédige un rapport qu’elle envoie aux deux chambres du Parlement irlandais, pour débat et examen par le gouvernement.

Celui-ci s’est expressément engagé à répondre par une déclaration ministérielle officielle adressée au Parlement dans les quatre mois suivant la réception de chaque rapport de la Convention. Le tout se passe dans un souci de transparence, des débats sont retransmis à la télévision et les thématiques traitées sont relayées par les associations, les syndicats, la presse11. Un cadre méthodologique strict permet donc d’assurer un résultat qualitatif à la fin de la délibération et une prise de position pertinente du plus grand nombre (en étant justement informé des enjeux). Ce processus a notamment permis à l’Irlande de délibérer dans une paix sociale à propos des questions de société comme le mariage entre personnes de même sexe.

Un changement positif à plusieurs égards

Dans un pays comme le nôtre, connu pour créer des lasagnes institutionnelles

incompréhensibles par le citoyen, l’idée même de toucher à la Constitution provoque souvent une certaine crainte. L’argument selon lequel c’est ouvrir une “boîte de Pandore” qui mène à la scission du pays est souvent avancé pour stopper toute initiative12.

L’exemple irlandais montre que les citoyen·nes peuvent, quand on leur en donne l’occasion, s’engager pleinement dans la construction de solutions mettant en avant l’intérêt général.13 La discussion autour de l’ouverture d’articles à la révision et la manière de conduire cette révision, en incluant les ceux et celles qui en vivront les impacts, peuvent être des moments-clés pour combler le fossé démocratique qui se creuse entre citoyen·nes et élu·es.

Dans ces conditions, dépasser l’argument selon lequel ce serait ouvrir une “boîte de Pandore” est salvateur. Réviser notre Constitution pour y intégrer de nouveaux droits s’avère être un exercice utile pour lutter contre les extrémismes de tout bord qui mettent en danger notre démocratie, pour prévenir la défiance grandissante envers les institutions et contrer les passions tristes de citoyen·nes passif·ves car impuissant·es. Cela est d’autant plus vrai que la finalité de notre démarche n’est pas de supprimer ni d'affaiblir le régime parlementaire, mais de le renforcer en lui adjoignant d’autres processus de prise de décisions impliquant la population : un des impacts des processus délibératifs souvent mis en avant, qu’ils soient mixtes (alliant citoyen·nes et élu·es) ou pas, est la meilleure compréhension par les citoyen·nes des logiques et contraintes avec lesquelles les élu·es politiques doivent composer.

C’est pourquoi le gouvernement actuel doit permettre la révision des articles de la Constitution garantissant aux citoyen·nes davantage de place dans les décisions qui influencent leur futur.

Et pour aller plus loin, un peu d’histoire…

Notre Constitution a été écrite il y a deux cent ans. À l’époque, elle était reconnue comme progressiste en garantissant par exemple la liberté de culte, d’enseignement ou encore de presse.

Elle posait aussi un système représentatif assez conservateur qui aujourd’hui ne correspond plus aux aspirations des citoyen·nes. Ces dernier·ères veulent aussi faire entendre leur voix pour peser sur les grands choix de politiques publiques qui influencent la santé, l’économie ou encore les actions climatiques.

La Constitution belge a établi notamment que « tous les pouvoirs émanent de la Nation », ces pouvoirs étant « exercés de la manière établie par la Constitution. » (article 33). La Constitution affirme ainsi sa suprématie sur tout autre source de droit et que le pouvoir de décision législative est exclusivement restreint aux personnes désignées par le peuple (par les élections).

Il est aussi précisé que « le pouvoir législatif fédéral s'exerce collectivement par le Roi, la Chambre des représentants et le Sénat » (article 36). La Belgique a fait le choix d’une monarchie représentative14.

S’est alors construit un récit faisant du système des élections la panacée démocratique au détriment de modes d’interactions plus directs entre les citoyen·nes et ses élu·es, qui soit n'ont pas été inscrits dans la Constitution, soit ont été limités au niveau consultatif (droit de révocation, référendum, consultation populaire…)15.

En réalité, c’est précisément la démocratie que les congressistes, à l’origine du texte de notre Constitution, ont cherché à éviter en 1830-183116. La possibilité de consultation populaire et de référendum a précisément été rejetée parce qu’elle semblait contraire à l’esprit représentatif aristocratique du régime belge.

Les limites à l’accès au droit de vote et au droit d’être élu·e étaient telles que seule une aristocratie élective pouvait sortir des urnes. En 1831, seul 1.1 % de la population vote.

Soixante ans plus tard, avant l’adaptation du système censitaire, on n'en était toujours qu'à 2.2% de la population.L’élection est donc choisie pour garantir une conservation du pouvoir au sein d’une aristocratie élective. Le Sénat, dans son historique officiel, donne au chapitre traitant de cette période le titre évocateur : « Qui paie assez, décide ».

L’extension du vote, via le suffrage universel (d’abord masculin), comme le montre de récentes analyses, ne fut pas synonyme de démocratisation via une plus grande participation dans la prise de décision. La constitutionnaliste Anne-Emmanuelle Bourgaux souligne que, certes, « le gouvernement représentatif belge s’est démocratisé de manière quantitative. Mais la question de sa démocratisation qualitative reste largement ouverte ».17

Le peu de place fait à la démocratie directe est le droit de pétition, consacré dans l’article 26 : « Chacun a le droit d’adresser aux autorités publiques des pétitions signées par une ou plusieurs personnes. Les autorités constituées ont seules le droit d’adresser des pétitions en nom collectif”. La place faite à une démocratie plus directe, via la consultation populaire ou publique, la co-rédaction de décret et les panels citoyens reste largement cosmétiques : ces dispositifs sont compliqués à mobiliser et la garantie de suivi est maigre. Seul un avis motivé doit être renvoyé aux pétitionnaires.

Depuis 1831, la constitution a peu changé, si ce n’est pour les évolutions de relation entre entités fédérées et fédérales. Mais rien ou quasi rien sur la manière dont les citoyen·nes peuvent être plus impliqué·es dans la prise de décision. En Angleterre et en France, on pratique le référendum. En Suisse, des votations populaires ont lieu régulièrement. Mais en Belgique, si peu !

Cette absence est dommageable car la population est mise de facto dans une position de passivité par rapport à la chose publique. Elle ne possède pas une capacité d’action et ce manque d’impact potentiel invite à son désinvestissement.

1. Pour le détail de la procédure, voir ici

2. L’intention rejoint peu les faits et la transparence n’est pas de mise dans l’établissement de cette liste par le gouvernement. Une proposition de résolution a d’ailleurs été déposée à la chambre des représentants en 2022 pour changer cet état de fait.

3. La révision de cet article n’est pas indispensable pour permettre la mise en œuvre de processus de démocratie participative (lire Julian Clarenne et Cécile Jadot, Les outils délibératifs auprès des parlements sous l’angle du droit constitutionnel belge, dans Bulletin du Crisp, N° 2517-2518). Mais néanmoins préférable selon d'autres constitutionnalistes, car les mots "émanation" et "nation" sont des notions floues dont l'inconsistance peut être brandie par ceux qui souhaiteraient maintenir le système établi.

4. voir www.senate.be/home/sections/institutioneel/20190524_institutional/20190524_institutional_fr.html

5. https://www.dekamer.be/doc/PCRA/pdf/54/ap281.pdf

6. Selon M. Zacharzewsky de Demsoc, la Belgique a développé de par sa structure politique complexe une solide expérience démocratique. Elle peut jouer un rôle de pionnier en matière de démocratie participative, à condition que des initiatives émanant de la société civile et des pouvoirs publics bénéficient d’un soutien à long terme. Rapport de la Commission du Renouveau démocratique et dela

Citoyenneté (juin 2021) https://www.senate.be/informatieverslagen/7-117/Senat_rapport_participation_accrue_des_citoyens-2021.pdf

7. Nous citerons par exemple les difficultés rencontrées dans les relations entre partenaires sociaux qui se manifestent notamment par une juridicisation des conflits, notamment à propos du droit de grève ou encore une proposition émanant de Nawal Ben Hammou, présidente de la Commission logement au parlement bruxellois de supprimer les commissions de concertation, de confier la délivrance des permis d'urbanisme au gouvernement bruxellois et de réduire le délai de recours au conseil d’état, la durée des enquêtes publiques ou de les réserver aux seuls grands projets.

8. “La guerre ! C'est une chose trop grave pour la confier à des militaires.”

9. Collectif pour une démocratie locale à Ottignies-Louvain-la-Neuve https://www.kayoux.be/  10https://www.agora.brussels/ en Région Bruxelloise.

10. Le pouvoir d’influence sur la décision au sein du parlement restant proportionnellement faible. 12 Hugue Dumont, Ouvrir à révision l’article 195 et réveiller le pouvoir constituant originaire : possibilité, risques et opportunités, CDPK 2019, pp. 442-452

11. Jane Suiter, David M. Farrell, Clodagh Harris, Eoin O’Malley, La première Convention constitutionnelle irlandaise (2013-2014) : un dispositif délibératif à forte légitimité ?, Traduction Xavier Blandin, dans Participations 2019/1 (N° 23), pp. 123 à 146

12. Comme l’ont montré les diverses réformes de l'État depuis les années 70 pour intégrer le fédéralisme.

13. The crisis of democracy and the science of deliberation, dans Science, mars 2019, Vol 363, Issue 6432, pp. 1144-1146. Consultable via : 10.1126/science.aaw2694 16 Hors droit européen.

14. Ce choix étant aussi celui des grandes Nations européennes ayant donné leur garantie à l’indépendance de la Belgique.

15. En Belgique, mais aussi dans la plupart des États s’étant constitués à ce moment. dans Bernard Manin, Principes du Gouvernement représentatif, Calmann-Lévy, 1995.

16. Thibault Gaudin, Vincent Jacquet, Jean-Benoît Pilet, Min Reuchamps, Consultation populaire et référendum en Belgique dans Courrier hebdomadaire du CRISP 2018/25-26 (n° 2390-2391), p.5 20 “La dimension élitaire et endogame du gouvernement représentatif de 1831 dessine les contours d’un espace politique démocratique au profit des élites à qui il est réservé”.Anne-Emmanuelle Bourgaux, La démocratisation du gouvernement représentatif en Belgique : une promesse oubliée ?, thèse de doctorat, 2013.

NB : élitaire et endogame : qui favorise un petit nombre et son groupe d’origine.

17. Thibaut Gaudin ajoute que les réformes élargissant le nombre d’électeurs et puis d’électrices sont surtout dû à un intérêt partisan des partis et non à une volonté formelle de donner plus de pouvoir au peuple. Démocratiser, confisquer, monopoliser les élections : Le rôle et les fonctions des partis politiques dans les grandes réformes électorales en Belgique (1830-1948). Thèse soutenue à l’ULB en 2022 22 Au niveau fédéral, il faut 25000 signatures pour qu’une pétition soit reçue. S’il en fait publicité à la chambre et que « les ministres sont tenus de donner des explications sur leur contenu, chaque fois que la Chambre l'exige. (article 57) », elles n’ont aucun effet contraignant. Des processus de pétition existent aussi au niveau régional et local, avec leus propres règles de fonctionnement.

Vers une gestion partagée du nouveau Centre de quartier de la Gare de l’Ouest

Depuis quelques mois, Periferia accompagne la commune de Molenbeek dans une réflexion sur la gestion du centre de quartier qui verra le jour à côté de la gare de l’ouest à la rentrée prochaine. Ce centre comprendra des locaux sportifs, associatifs, polyvalents et un petit espace de restauration. En s’inspirant du CLT et du Centre Communautaire Maritime de Molenbeek, l’objectif est de construire un modèle basé sur une gestion conjointe d’habitant·es, d’associations et de la commune. D’ici à la fin des travaux (le centre tant en construction), Periferia va ainsi accompagner la mise en place d’un groupe porteur, qui comprend à la fois des habitant·es du quartier, des associations qui y sont actives, et des représentant·es politiques et de l’administration molenbeekoise. Ce groupe aura pour mission de définir ensemble le fonctionnement du futur centre (quelles associations occuperont les locaux, quels horaires d’ouverture seront mis en place, quelles possibilités d’accès aux salles pour les habitant·es…) et de rédiger les statuts de l’ASBL gestionnaire du lieu.

Ce 29 novembre, Periferia a animé la Commission de Quartier du contrat de quartier Autour du Parc de l’Ouest, pour laquelle l’objectif était double :

  1. Présenter le projet de centre et le processus menant à une gestion collective ;
  2. Identifier des premières personnes et associations désireuses de prendre part au groupe porteur.

Cette soirée a également permis un premier échange entre les personnes présentes concernant les besoins et envies pour le centre (en termes d’activités, d’équipements…) et d’identifier les potentiels mais également les risques pressentis : des premiers pas pour prendre conscience des différents point-de-vue des personnes présentes, mais également des endroits où tous·tes se rejoignent.

Nous voilà donc parti·es pour un processus qui durera jusqu’à septembre prochain. Merci à toutes les personnes présentes ce soir-là. Nous avons été heureuses d’ouvrir le champ des possibles et nous nous réjouissons de continuer sur cette lancée !

Panneau_gestion_quartiers

Source image : Periferia aisbl

Vous êtes une association active dans le quartier de la gare de l’Ouest, ou un habitant·e du quartier et vous êtes intéressé·e de rejoindre la réflexion collective sur le futur centre de quartier ? Il n’est pas trop tard, contactez-nous pour être tenu·e au courant des prochaines étapes !

Vous pouvez retrouver les informations concernant ce projet, à cette adresse.