Repenser les espaces publics pour favoriser l’égalité de genre

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Depuis quelques années déjà, Periferia participe à plusieurs dynamiques autour de la place des femmes et des jeunes dans les espaces publics. En effet, prendre en compte les pratiques et reconnaitre l’expertise d’usage des femmes apparait comme une nécessité afin de garantir certains droits fondamentaux comme :

  • Un droit d’accessibilité ;
  • Un droit d’appropriation ;
  • Un droit à la participation au prise de décision et à l’exercice de la citoyenneté

Lors des diagnostics territoriaux participatifs réalisés, de marches exploratoires, d’ateliers en non mixité, le constat a été à chaque fois le même : celui d’une différence d’usages entre les hommes et les femmes de la ville et de ses espaces publics.  Les filles semblent moins occuper les espaces publics (notamment espaces sportifs et de loisir) que les garçons.

Pourtant, en région Bruxelloise, on constate que la question de l’égalité filles/garçons reste encore peu présente dans les réflexions sur l’aménagement des espaces et les investissements publics destinés aux loisirs des jeunes.

Mais comment prendre en compte les pratiques et le vécu des femmes dans l’aménagement ?

Nous sommes allés à la rencontre d’Edith Maruéjouls, autrice de la thèse : « Mixité, égalité et genre dans les espaces du loisir des jeunes : pertinence d'un paradigme féministe » et directrice de l’ARObE, l’Atelier Recherche Observatoire Égalité, un bureau d’études spécialisé dans l’aménagement égalitaires des espaces et la lutte contre les stéréotypes de genre afin de tenter d’y répondre.

Les réponses d'Edith Maruéjouls aux 3 questions que nous lui avons posées

  1. Un exemple d’aménagement inégalitaire ?
  2. Des conseils pour des aménagements plus égalitaires ?
  3. Les aménagements égalitaires : tout le monde gagnant ?

Cliquez sur l'image ci-dessous pour voir la vidéo de l'entretien !

Pour aller plus loin avec Edith Maruéjouls :

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Faire je(u) égal

Penser les espaces à l’école pour inclure tous les enfants

Description :
Véritables espaces publics miniatures, les cours de récréation sont le lieu des premières inégalités – en particulier entre filles et garçons. L’aménagement des espaces peut en effet jouer un rôle déterminant dans la reproduction de schémas discriminants. L’absence de mixité, par exemple, est souvent favorisée par la configuration des lieux et le type d’activités qui y sont proposées. En analysant ces espaces scolaires et les relations qui s’y nouent, Édith Maruéjouls aide les écoles à lutter concrètement contre les discriminations liées au genre. Elle nous invite dans cet ouvrage très abordable à découvrir ces «géographies scolaires du genre», sa méthode de travail et les solutions permettant de rendre l’école plus inclusive. Car il est essentiel pour la réduction des inégalités et des violences de genre dans nos sociétés que tous et toutes puissent faire, au moins à l’école, je(u) égal.

Éditions Double Ponctuation, Collection "Point d'interrogation" (études, recherche, questions de société) - ISBN : 978-2-490855-36-0
16€ - 126 pages, 21x14,8x1cm, 150g
Parution en France, Suisse et Belgique en Août 2022 ; Parution à l'automne au Québec - Version Epub à venir

Comment sortir des traditionnels street workout ou terrains de football utilisés presque exclusivement par des jeunes garçons ? Quels aménagements pour que les filles occupent et jouissent d’un droit à l’espace public et au loisir elles aussi ?

L’exemple du groupe citoyen « La ville est à nous, AUSSI ! »

Après une phase de diagnostic sensible du quartier où habitent un groupe de jeunes filles, celles-ci cherchent des solutions en termes d’aménagement pour se sentir à l’aise dans l’espace public et pouvoir se l’approprier.

Pour en savoir plus et découvrir le Manifeste rédigé par le groupe, c'est par ici !

Pour elles, il est important d’avoir un espace ludique, un espace « agréable pour se poser », pour inciter les jeunes filles à l’occuper. Si les espaces ludiques sont souvent pensés pour les enfants, d’autres peuvent être conçus pour les plus grand·e·s. Certains espaces ludiques peuvent ainsi être appropriés par les adolescentes. Différentes dimensions à prendre en compte :

S'amuser/ jouer  : avoir des structures en bois/ hamacs / grandes balançoires / balancelles
Se retrouver / se rencontrer :  Tables et bancs, balancelles en face à face, filet géant
Se sentir en sécurité :

  • Planter des petits buissons autour pour être tranquilles, pas à la vue de tou·te·s quand on est assises.
  • Un système de lumières qui permette de pouvoir rester le soir/en fin d'après-midi

Quelques exemples d'aménagements plébiscités

Make Space for Girls pense les espaces publics avec les filles et jeunes femmes pour que les aménagements tiennent compte de leurs volontés et besoins, et "pas seulement ceux des jeunes hommes".

Plusieurs exemples d'aménagements sont repris. Celui sur l'image à droite a été très inspirant pour le groupe  'la Ville est à nous AUSSI'.

En effet, il reprend les différentes dimensions : ludique, où l'on peut être à plusieurs, notamment en face à face. Côté intimité, les arbres peuvent suffire, en fonction de où on se trouve et ce qui nous entoure.

Pour en savoir plus : https://makespaceforgirls.co.uk/about-us/

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Un groupe d'étudiant·e·s de Belgique et de France a aussi travaillé à la recherche de solutions en termes d'aménagements après avoir entendu parler du diagnostic réalisé par le groupe 'la ville est à nous, AUSSI.'

Sur la photo de gauche, le groupe a imaginé un espace qui soit accessible à tou·te·s, ludique pour tous les âges et convivial. C'est notamment le cas de la balançoire ronde et du filet pour se détendre.

A Copenhague, l'expérimentation sur les espaces publics est inspirante. Les balancelles ont largement étaient plébiscité par le groupe.

Au-delà des aménagements, inciter l’appropriation des espaces publics

Au-delà de l’aménagement des espaces, comme le rappelle Edith Maruéjouls dans la vidéo, se pose la question de qui occupe l'espace public. On constate que les jeunes femmes sont moins visibles et occupent rarement l'espace en groupe, à la différence des hommes.

Dès lors, il est aussi intéressant de développer des stratégies d’appropriation des espaces publics en groupe.

L’exemple des « Steph Girls » et de l’occupation temporaire du parc Stephenson (Schaerbeek)

A Schaerbeek, une occupation temporaire est mise en place dans un espace jusqu'alors privé, qui deviendra après travaux un parc ouvert à tou·te·s. La question de l'accès et de l'appropriation par les femmes et jeunes femmes de ce futur espace public est très vite apparue. Le groupe de jeunes femmes "les Steph Girls" ont voulu occuper cet espace en tant que groupe, et cela en non mixité. L'appel est lancé aux filles du quartier : "viens aménager un espace filles dans le quartier et réfléchir au futur parc !". Il s'agit d'abord d'occuper l'espace public en groupe et d'y faire les activités voulues par les Steph Girls. Derrière, la volonté de faire comprendre aux garçons : "le quartier n'est pas qu'à vous".

Une double stratégie à mettre en place

A la lumière de ces témoignages, il nous semble que favoriser l'égalité filles-garçons dans les espaces publics passe par un équilibre entre deux pratiques :

  • l'occupation au quotidien des espaces publics par les femmes, notamment en groupe afin de se les approprier ;
  • la mise en place d'aménagement et de plans d'aménagement égalitaire, à partir d'une réflexion sur le genre et de la participation des jeunes femmes aux processus de conception et de gestion de ces espaces.

Les jeunes demandent et ouvrent des voies pour de nouvelles formes de coopération

Cet article retrace l’histoire d’allers/retours et de liens qui se sont tissés au cours des deux dernières années entre des jeunes du Nordeste du Brésil et de Bruxelles. Une rencontre sur le « Droit à la ville » à Recife en mars 2019 a été le point de départ de plusieurs "perturbations" assez positives dont nous allons vous parler... Une invitation à sortir de nos schémas, à repenser nos façons d'agir et expérimenter de nouveaux modes de faire.

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Rencontre « Éducation populaire, jeunesse et droit à la ville », mars 2019

Une rencontre pour croiser les points de vue des jeunes sur le droit à la ville

Periferia est née d’un pari, d’une intuition, celle que l’échange permet de nous enrichir grâce aux questionnements, au développement d’une vision critique sur notre propre société et notre quotidien…

C’est dans cette perspective nous avons imaginé, courant 2019, avec des partenaires brésiliens (CAIS, CDVHS, CENDHEC, CEAS, FASE) une rencontre qui regrouperait des jeunes venant de différents endroits du Nordeste (Fortaleza, Recife et Salvador de Bahia) afin qu’ils puissent échanger sur leur vision de la ville. Nous étions ±15 personnes, pour la plupart des jeunes femmes de 18 à 28 ans.

En amont de la rencontre, chaque groupe de jeunes avaient préparé des cartes affectives, supports d’expression sur ses ressentis dans l’espace public, mais aussi d’auto-analyses sur les formes d’appropriation et les stratégies mises en place pour occuper la ville. « Dans la ville, où nos corps sont acceptés ? » : c’est de cette façon qu’un groupe a traduit et pensé sa carte. Une manière de souligner combien la perception de la ville est aussi fonction de la place qu’on y prend et que les autres nous laissent.
Cela a été l’occasion pour nous de raconter une démarche similaire menée avec un groupe de jeunes femmes à Molenbeek (Belgique) et de constater collectivement les similitudes entre les différents contextes, notamment en termes de discriminations pour les femmes et les personnes racisées dans l’occupation de l’espace public.

Plus tard lors de la rencontre, un soir, nous avons été soutenir les derniers moments d’une occupation organisée pour résister contre une expulsion : un terrain dans le centre de Recife qui allait être aménagé pour construire des tours de logement et commerces à destination de la classe moyenne. Une manière « d’occuper comme un moyen de résistance et d’affirmation de son corps, de sa place dans la ville ! »

Cette rencontre a été remplie de moments de partage : cartes affectives, expressions de chacun·e à travers des vidéos, des textes, de la musique..., moments de résistance aux côtés des autres, réflexions collectives. Ces images, ces mots, ces sons, ont été autant de témoignages de la violence subie par les jeunes des périphéries et de la force de la résistance qui s’organise au sein des quartiers. « Nous ne sommes pas dans une rencontre classique, nous sommes en train de vivre une expérience collective » a partagé une jeune au groupe, parce que l'espace a permis de tisser des liens forts et de construire un morceau d’histoire collective.

Le dernier jour, nous avons partagé nos impressions et nos perspectives : les participant·e·s ont insisté pour que la prochaine rencontre soit organisée avec eux dès le début. Notamment pour le choix du lieu, il est important de se réunir dans les quartiers périphériques d’où viennent les jeunes et non dans le centre-ville. Symboliquement cela permet de reconnaitre ces quartiers comme partie intégrante de la ville et permet de ne pas renforcer le sentiment d’exclusion que les jeunes subissent au quotidien. D’autre part, multiplier les moments de vie collective et conviviaux comme partager un repas, cuisiner ensemble, aller à un concert, faire une visite du quartier avec ses habitant·e·s pour valoriser leurs capacités et mieux comprendre la vie des jeunes. Pour finir, renforcer la participation des jeunes en ouvrant leur regard sur la gestion des budgets au sein des ONG et notamment pour l’organisation de telles rencontres. En résumé, « Faire AVEC la jeunesse et non POUR elle » et inventer d’autres manières de se rencontrer afin de renforcer la parole et les modes de résistances développés par les jeunes.

Se rencontrer à travers d’autres moyens

Début 2020, toujours plein d’énergies de la rencontre de Recife, nous nous sommes réunis virtuellement pour réfléchir avec les jeunes à l’organisation d’une nouvelle rencontre dans une autre ville du Nordeste. C'était sans penser que la pandémie allait rendre tout rassemblement impossible...

Mais les confinements que nous avons vécus, tous et en même temps chacun de manière différente, nous ont encouragés à inventer de nouvelles formes de dialogue. En juin, en Belgique, c'était le début du premier déconfinement et la redécouverte de l’espace public, alors qu'au Brésil la crise se poursuivait, chacun·e chez soi. Afin de créer des liens entre ces réalités différentes, nous avons imaginé la construction de dialogues à travers l’envoi de cartes postales pour créer des ponts au-delà de l’Atlantique entre des habitant·e·s de la ville de Fortaleza et du quartier Stephenson (Schaerbeek).

Les mercredis de l’été, sur une place du quartier (la place Stephenson), les passant·e·s étaient invité·e·s à venir s’assoir à une table, boire un cocktail de fruits et écrire une carte postale, un message pour les jeunes de Fortaleza. Comme au café, mais le paiement se faisait en mots ! Chaque semaine, les cartes étaient « postées » sur notre compte Instagram. Les brésilien·ne·s pouvaient réagir et nous transmettre leurs cartes.

Messages de courage, mémoire de quarantaine, partage d’œuvres (film, musique…) mais aussi questions et souhaits pour le monde de “l’après” : Quel monde voulons-nous ? Comment résister et s’organiser face à la crise sociale et sanitaire que nous devons affronter ? Au fils des semaines, des dialogues se sont construits et nous avons vu des préoccupations similaires apparaitre des deux côtés de l’atlantique, notamment sur les différences de vécus et de traitement en fonction des quartiers (accès au système de santé, répression policière...).

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Continuer à partager... les situations que nous avons vécues tous ensemble

Ces messages par le biais de cartes postales ont permis différents échanges, rendant possible la participation d'autres personnes. Mais en même temps, ils ne pouvaient pas remplacer l'idée initiale de donner une continuité à tout ce qui avait été partagé lors de la rencontre - ou plutôt, de « l’expérience collective » - de Recife. Nous avons donc profité des opportunités offertes par les numérique pour rassembler des jeunes de plusieurs villes du Nordeste brésilien avec des jeunes de Bruxelles.

En décembre 2020, nous nous sommes rencontrés, chacun·e derrière son propre écran, mais ensemble. Nous étions environ 25, certains se connaissant depuis Recife, d'autres venant pour la première fois de Guarabira, João Pessoa et Bruxelles.

Nous avons commencé la réunion en partageant des dessins « représentant nos corps et notre relation à la ville pendant la pandémie » : une façon de nous présenter à partir de ce que nous ressentons. Des images fortes ont été échangées, dans de nombreux cas, l'exclusion, la répression, le manque de liberté, la difficile survie dans les périphéries et encore plus pour les femmes noires.

Chaque groupe, depuis sa ville, a partagé des éléments de sa réalité en temps de pandémie : à travers des réflexions collectives, des vidéos, de la musique... est apparue la crise profonde que traverse le Brésil, sur le plan sanitaire, sociale mais également politique. Les familles déjà vulnérables, en particulier celles qui travaillent dans l'économie informelle et vivent dans des territoires où les services publics adéquats tels que l'assainissement de base, l'eau potable, l’accès à internet et les transports urbains font défaut, ont vu leurs conditions de vie encore aggravées par la perte de revenus, le manque de nourriture et l'absence de matériel d'hygiène pour se protéger du covid 19. Le manque de réponse des pouvoirs publics (État fédéral et municipalités) a augmenté les contaminations et le nombre de décès. Ainsi le Covid met en avant et donne une plus grande visibilité à tant de crises (sociale, politique, sanitaire…) qui existaient déjà et qui creusent de plus en plus les inégalités.

Un des défis majeurs soulignés par tou·te·s aussi bien dans le contexte belge que brésilien a été la question des discriminations raciales et des violences policières à l’égard des jeunes qui ont augmenté durant les confinements, conduisant à la mort de nombreux jeunes.

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Résister, créer ensemble, se projeter

Heureusement, les jeunes ont également partagé leurs manières de résister : des espaces et moments collectifs où ils se renforcent, s'expriment pour être entendus et revendiquer leurs droits.

« Pourquoi ne pas produire une musique avec des voix du Brésil et de Belgique pour s'exprimer, sensibiliser et se faire entendre ? Ce serait une façon de se rapprocher, de mettre en évidence combien les discriminations sont globales et structurelles. »

« Plus que jamais, nous devons occuper les périphéries car c'est là que se trouvent nos racines, nos familles. »

Dans ce sens, de nombreux jeunes ont joué un rôle central dans l'organisation de la solidarité au sein des quartiers : distributions
de paniers alimentaires ou de masques, campagne de sensibilisation sur les gestes barrières mais aussi organisation de formation et de débats sur la prise en compte des questions de genre et de race au sein des politiques publiques
mises en place.
Les jeunes de Bruxelles ont présenté une de leurs musiques dénonçant les injustices.

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Le récit d’une histoire collective

Nous partageons ici une histoire collective qui change nos perspectives. Nous avons perçu, dès ce premier moment à Recife, que nous ouvrions ensemble de nouvelles voies qui laissent place à l’expérimentation, à d'autres façons de se rencontrer, de s'exprimer. Nous avons imaginé des espaces sans trop prévoir, en nous laissant guider par les opportunités et la force du collectif. Nous avons facilité des ouvertures vers l'improbable, vers l'inconnu...

Pour les jeunes qui se sentent discriminés en raison de leur histoire, de leurs origines, de leurs choix de vie... participer et nourrir ces échanges contribue à une reconnaissance collective et à l'affirmation de leur place en tant que personne dans la ville.

Ces allers-retours entre le Brésil et la Belgique nous montrent à quel point les situations vécues dans les deux pays, pourtant éloignés géographiquement, politiquement et culturellement, se recoupent. La ségrégation urbaine, la discrimination des jeunes issus des périphéries, la violence subie chaque jour dans les quartiers populaires existent des deux côtés de l’Atlantique et doivent être combattues de manière articulée. Proposer des espaces de connexion pour réfléchir ensemble à la manière d'agir replace les combats de chacun·e dans une perspective de changement social plus global et nous permet alors de repenser notre propre capacité à agir en s’inspirant des modes de faire et stratégies mis en place par d’autres, mais aussi de déconstruire collectivement les paradigmes dominants auxquels le monde entier est confronté.

Force des échanges, source d'inspiration et d'espoir, créativité et audace collective… pour Periferia, nous voyons ce chemin parcouru comme le début d'une histoire que nous voulons raconter et continuer à écrire ensemble.

Etude – les Budgets Participatifs : un outil pour de nouvelles démocraties ?

L’étude souligne le point de vue de Periferia au sujet des Budgets Participatifs. Nous constatons que les nouveaux dispositifs actuels s’éloignent fortement du « faire commun » que permet le BP autour des ressources publiques et, surtout, ne permettent pas une implication des citoyens dans les choix politiques de leurs communes.

Le Budget Participatif nous semble vecteur de changements démocratiques. Comment pouvons-nous, à nouveau, nous emparer collectivement des Budgets Participatifs ? Nous montrons grâce à cette étude la force que peut avoir un BP pour construire du « commun » autour et à partir des finances publiques. 

Tout au long du document, nous présentons des expériences (13 au total) de 4 continents pour montrer comment, au-delà des mots, des femmes et des hommes ont mis en oeuvre des Budgets Participatifs audacieux et au service de transformations soci(ét)ales.

Cliquez ici ou sur l'image pour accéder au document pdf !

Éducation populaire et community organizing : quelles différences et complémentarité ?

En mars 2020, nous invitions Adeline de Lepinay à venir présenter son livre « Organisons-nous ! Manuel critique » (Edition Hors d’Atteinte, 2019) et animer un atelier de réflexion pour explorer les enjeux autour de l’éducation populaire et du community organizing. Rencontrant un franc succès, ce deux moments ont permis d’aborder une série de questions et enjeux que nous détaillons ici avec l’envie de proposer des clés d’analyse et de compréhension pour nous aider à mieux identifier les leviers d’action que l’on peut mettre en place lorsqu’on souhaite agir contre les injustices.

Travailleuse sociale, formatrice, militante syndicale et politique, Adeline de Lepinay a notamment eu l’occasion de participer à la création de l’Alliance Citoyenne à Aubervilliers, une organisation qui rassemble plusieurs centaines de citoyen·ne·s autour de campagnes de mobilisation et d’actions visant des problématiques telles que le mal-logement, les droits civiques pour les femmes musulmanes, l’accès à l’eau comme bien commun…

Atelier avec Adeline de Lepinay
Atelier avec Adeline de Lepinay

Community organizing et éducation populaire : quelles différences ?

Cette organisation s’appuie sur des méthodes d’organisation assez rigoureuses et structurées que l’on nomme « community organizing » et que nous avons déjà eu l’occasion de présenter par le passé – voir publications et base de données / mettre lien. L’expression n’a pas vraiment d’équivalent en français mais on pourrait la traduire en Belgique par « organisation communautaire ». La particularité de cette approche réside dans son côté très pragmatique et orienté vers les résultats concrets et rapides, mais également la création de rapports de force avec les personnes qui détiennent le pouvoir pour les obliger à concéder et à négocier. Pour ce faire, il est nécessaire de réunir le grand nombre de personnes concernées par une même problématique en mettant en place des campagnes de mobilisation massive à travers du porte à porte notamment.

Il s’agit donc de viser des petites « victoires » plutôt que d’attendre le grand « soir », dans l’espoir que les petites victoires finiront pas devenir grandes…

L’éducation populaire cherche quant à elle à travailler notre compréhension du monde et notre capacité à avoir prise sur celui-ci en vue de le transformer.

D’emblée, il faut préciser que chacune de ses deux approches est elle-même traversée par différents mouvements et ne peuvent se résumer facilement. Elles-mêmes vont puiser leurs racines dans d’autres mouvements tels que le syndicalisme, l’action communautaire, les mouvements de désobéissance civile ou l’action non-violente.

L’horizon de transformation sociale est bien commun mais les manières d’y arriver diffèrent et nous amènent à nous demander dans quelle mesure ces deux approches peuvent-elles cohabiter dans un même processus.

« Pour cela, l’éducation populaire nous invite à travailler à partir de nos situations pour les analyser, les comprendre, agir pour les transformer. L’objectif étant de transformer la société, les démarches d’éducation populaire ne sauraient être neutres. »

Une nécessité de s’organiser ET d’analyser

Nombreux.ses sont les personnes impliquées dans des collectifs et association à s’interroger sur les processus et stratégies à mettre en place pour arriver à une réelle transformation sociale. Si la volonté de changement est bien présente, beaucoup de personnes se questionnent sur les voies à prendre lorsqu’il s’agit de s’engager concrètement. Les manières d’y arriver et de s’organiser diffèrent et divergent parfois. Or, «« La » transformation sociale ne saurait advenir du jour au lendemain, en une fois, lors d’un grand soir ouvrant sur des lendemains qui chantent. Elle ne pourra résulter que d’une action constante d’éducation, d’organisation, d’agitation, de résistances, de luttes et de solutions alternatives : une action qui n’est pas spontanée et dont nous devons nous donner les moyens, d’autant plus que les forces adverses sont, elles, organisées et puissantes. » écrit Adeline de Lepinay. Sans pour autant rejeter le côté spontanée de certaines luttes qui naissent sans qu’il y ait une coordination préalable (Gilets jaunes, révolution arabe…), le postulat de départ est  bien que transformation dit organisation et coordination. Ce passage  illustre bien  aussi la nécessité de ne pas s’enfermer dans une vision ni de chercher à affirmer qu’une « stratégie » ou approche est meilleure qu’une autre. Cependant, il existe des tensions qui peuvent apparaitre, notamment entre une vision qui s’appuie davantage sur le processus (éducation populaire) et une autre sur les résultats (community organizing).  Entre recherche de résultats et nécessité de prendre le temps pour construire des mouvements inclusifs, durables et égalitaire, il n’est pas toujours évident de trouver le juste milieu.

« La » transformation sociale ne saurait advenir du jour au lendemain, en une fois, lors d’un grand soir ouvrant sur des lendemains qui chantent. Elle ne pourra résulter que d’une action constante d’éducation, d’organisation, d’agitation, de résistances, de luttes et de solutions alternatives : une action qui n’est pas spontanée et dont nous devons nous donner les moyens, d’autant plus que les forces adverses sont, elles, organisées et puissantes. »

A la recherche de l’efficacité à tout prix ?

Une des critiques qui est faite par Adeline de Lepinay au « community organizing » réside justement dans sa recherche d’efficacité maximum et d’optimalisation des moyens : une recherche de rentabilité au détriment du reste ? Il ne nous revient pas de trancher mais de pointer ici un élément qu’il nous semble important à prendre en compte : là où l’éducation est d’abord et avant tout centrée sur le processus, la recherche de résultats peut amener à mettre de côté des questions qui viennent ralentir le rythme : on pense ici notamment à tout ce qui touche aux questions d’inclusion, de dynamique de groupe ou encore de temps consacrés à l’évaluation.

« Chercher une réelle efficacité nécessite donc de prendre le temps de l’analyse, de définir notre boussole politique, de travailler les contradictions : c’est le temps de notre éducation populaire. Si l’on s’inscrit dans la rationalité du capitalisme et du néolibéralisme, on reproduit leurs vices, on se concentre sur des objectifs et des indicateurs de court terme, on inverse nos objectifs et nos moyens, on oublie la finalité de notre action. À l’inverse, en restant braqué·es sur une radicalité et une pureté sans faille, on se condamne à ne pas agir dans la complexité et à être impuissant·es à transformer les choses au-delà de nous-mêmes. »

Ce passage extrait d’un article de la revue Contretemps consacré au livre évoque assez justement la nécessité de trouver un équilibre entre « réfléchir » et « agir ». La recherche d’efficacité se ferait-elle nécessairement au détriment de démarches plus réflexives ? Pas sûr, mais cela ne va pas de soi. Peut-être qu’il faut pouvoir aussi reconsidérer ce qu’on met derrière l’efficacité – sans lui faire de procès d’intention ou lui donner trop de vertu – en nommant ce que cela signife concrètement. On sortira alors peut-être  de l’opposition stérile entre réflexion et action pour les voir comme les deux faces d’une même pièce où l’efficacité serait justement cette capacité à mener les deux de front.

« Être radical·e n’est pas foncer dans le tas sans se préoccuper des conséquences, mais être capable d’affronter la complexité, d’agir et d’avancer dans le réel tout en restant cohérent·e avec ses valeurs. »

Pour aller plus loin :https://www.contretemps.eu/organisation-transformation-sociale/#_ftn2

 

 

Des petites victoires qui ne changent pas le système ?

Derrière cette recherche d’efficacité, on retrouve aussi une vision pragmatique : « Dans la quête de l’efficacité, il est commun de faire appel à ce qu’on appelle le «pragmatisme». Celui-ci consiste à viser une efficacité ancrée dans le réel : à court terme, circonstanciée, mais qui, si on se réfère au sens philosophique du mot, intègre une certaine continuité entre les fins et les moyens, donc une certaine cohérence entre court et long termes. On a tendance à assimiler le pragmatisme à un rejet des grands discours, donc, bien souvent, à un refus de prendre le temps de la discussion. Pourtant, elle seule permet de développer une analyse et une vision. [1]»

La rationalisation est-elle forcément le synonyme d’une perte de sens dans nos pratiques ? Pour Adeline de Lepinay, certaines organisations ont laissé de côté leur éthique au détriment d’une recherche de résultats à court terme et de l’utilisation de moyens critiquables (alliance avec d’autres organisations qui ont des valeurs contraires, techniques qui s’apparentent à de la manipulation…). Mais il serait trop simpliste de résumer les choses telles quelles. La question qui se pose est de savoir où situer son horizon de transformation pour pouvoir être à la fois dans quelque chose de réaliste (et donc réalisable dans un temps pas trop long) et « révolutionnaire », en proposant une vision à plus long terme. Sans cet horizon plus lointain, il est fort probable que les actions menées sur le court et moyen terme perdent de leur sens et ne fassent que renforcer un système que l'on combat.

« C’est là le principe de la « double-besogne » décrite dans la charte d’Amiens, qui nous invite à concevoir toute action et toute lutte sur deux temporalités : celle des revendications immédiates pour l’amélioration d’un quotidien difficile, fait d’oppressions et d’exploitations concrètes, et celle de la construction de la possibilité d’une transformation d’en- semble de la société et de la sortie du capitalisme. Nos actions et nos luttes particulières doivent nous inviter à imaginer et à inventer ce qui pourrait exister au-delà d’elles, à produire des idées nouvelles, à porter des ambitions émancipatrices. Tout en agissant et en luttant pour des transformations dans la société, c’est bien une transformation de la société qu’il s’agit de viser. Rester connecté·es à notre finalité, cela implique d’accepter de tâtonner, d’adapter en permanence nos actions en fonction des effets qu’elles produisent, d’agir tout en ayant conscience des limites de notre action. »

[1] ttps://www.contretemps.eu/organisation-transformation-sociale/#_ftn2

Dans, avec, contre et hors du pouvoir

Penser la complexité, ne veut pas dire développer une pensée complexe. Dans ce sens, Adeline de Lepinay nous donner des clés pour mieux saisir ce qui se joue et pouvoir développer une action qui fasse sens. Lors de l’atelier, nous avons pu expérimenter quelques outils concrets qui sont d’une aide précieuse pour à la fois penser et agir nos actions de transformation. Un de ceux-là, consiste en une boussole pour penser notre relation au pouvoir. Il est composé de 4 portes d’entrées :

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              • DANS le pouvoir : agir depuis l’intérieur du système
                – Résistance et subversion
                – Depuis le pouvoir d’Etat
                – L’offre institutionnelle de démocratie participative
              • AVEC le pouvoir : créer un rapport de force pour négocier et obtenir des réformes
                – Créer le rapport de force
                – Revendications et négociation
                – Et après la négociation ?
              • CONTRE le pouvoir : refuser de négocier
                – Rêver à plus grand que ça : la puissance des luttes sans revendications
                – Violence et diversité des tactiques
              • HORS du pouvoir : ne pas attendre le changement pour changer
                – Expérimenter, transformer, préfigurer
                – Compenser et construire des solidarités directes

Cette boussole a particulièrement retenu l’attention des participant.es dans ce sens qu’elle permet encore une fois de ne pas opposer les statégies mais de les penser de façon complémentaire. A l’heure où on nous demande souvent de choisir « son camp », il est intéressant de voir que chaque position a son avantage et ses limites et que ce n’est qu’en pensant et en agissant de façon intégrée que nous pourrons réellement forcer un changement.

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Un autre outil très concrets consiste à établir une cartographie des acteurs et actrices en lien avec une problématique en identifiant si il.elle.s sont davantage des allié·e·s ou des opposant·e·s à notre cause et savoir de quels pouvoirs ils.elles disposent. (voir image). La question du pouvoir est souvent négligée ou peu abordée. C’est une notion qui fait peur et dont nous préférons ne pas nous saisir. Or, nous savons que les rapports de force existent en permanence et qu’ils doivent pouvoir être pensés en tant que tels si on veut pouvoir les utiliser avec nous plutôt que contre nous. Et les déconstruire.

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Ressources pour aller plus loin

 

LIVRE / Organisons-nous ! Manuel critique

Croisant des démarches à visée émancipatrice de l'éducation populaire et des stratégies venues des États-Unis « d'organizing », le livre Organisons-nous ! Manuel critique (Edition Hors d’Atteinte, 2019) d’Adeline de Lepinay veut contribuer aux réflexions militantes qui cherchent à agir concrètement contre les injustices.

 

VIDEO / Conférence ” Organisons-nous ! Manuel critique “

Vidéo de la conférence organisée le 5 mars 2020 au DK à Saint-Gilles (Bruxelles, Belgique) avec Adeline de Lépinay autour de son livre.

VIDEO / Éducation populaire et Community Organizing - Entretien avec Adeline de Lépinay

L'interview d'Adeline de Lépinay dans nos bureaux.

ARTICLES /

 

BASE DE DONNEES / COMMUNITY ORGANIZING

Article – Le community organizing en France : quel projet politique ?

Par Marion Carrel et Adeline de Lépinay - Mouvements, 2016

Alors que des campagnes inspirées du community organizing commencent à se développer en France, la curiosité et les attentes sont grandes. En quoi ces expériences constituent-elles des démarches de politisation, d’éducation populaire dans les quartiers populaires ? La question démocratique dans le mouvement social est-elle renouvelée ? Au-delà du pragmatisme clairement revendiqué, quel est le projet politique ? Quel est le levier utilisé pour mobiliser : injustices sociales, discriminations ? Nous avons souhaité donner la parole à trois pionniers du community organizing en France : Laëtitia Nonone, présidente de l’association Zonzon 93 à Villepinte, L. Real, consultant à Studio Praxis et l’un des organisateurs de la campagne nationale Stop le contrôle au faciès, et Adrien Roux, co-fondateur et organisateur au sein de l’Alliance citoyenne de l’agglomération grenobloise et du Réseau pour l’action collective transnationale (ReACT).

Article disponible en cliquant ici (revue Mouvement, site CAIRN, 3euros)

 

Article – Rethinking Community organizing

Par Katie Horvath, The Symbiosis Research Collective – The Ecologist, 2018

En anglais

En replaçant le community organizing dans son contexte initial, le collectif “The Symbiosis Research Collective” propose de revenir sur les principes de cette méthode pour les questionner. Le rôle central de l’organizer au sein du processus est ici vu de manière critique. Les changements sociétaux ambitieux souhaités par l’organisation invitent à penser le monde “comme il devrait être” et non pas “comme il est”, ce qui est parfois difficile à mettre en pratique à une échelle locale. La volonté première pour Alinsky de s'organiser à travers des institutions existantes semble limiter le pouvoir d’agir, allant parfois jusqu’à reproduire une échelle hiérarchique que l’on souhaitait dénoncer. Cet article met en lumière les limites du modèle d’Alinsky, à travers des expériences de terrain contées par des organizers.

Disponible en ligne sur le site The Ecologist : cliquez ici

Article – Experts en mobilisation des pauvres ? La professionnalisation du community organizing à Chicago

Par Clément Petitjean - Mouvements, 2016

Si les pratiques militantes du community organizing font l’objet de plus en plus d’analyses empiriques, la question de la professionnalisation de cette forme de militantisme est souvent peu abordée. On se focalise sur la cause, laissant ainsi dans l’ombre les entrepreneurs de cause. Or l’appréhension des dynamiques de professionnalisation du community organizing et de la constitution d’un groupe de professionnels de la mobilisation des classes populaires apparaît nécessaire pour penser les modalités d’action collective des dominés et la lutte contre la dépossession politique.

Article de la revue Mouvements disponible en cliquant ici (CAIRN, 3 euros)

Article – Faire « avec » les habitants. « Pouvoir d’agir » et renouvellement des pratiques des centres sociaux

Par Guillaume Coti – Mouvements, 2016

Faire « pour » ou « avec » les habitants ? Cette question interroge certains militants et salariés des centres sociaux qui ne se contentent plus de la position de prestataire des politiques sociales à laquelle ils sont cantonnés. Guillaume Coti, ancien directeur d’un centre social parisien, nous livre ici un panorama des tensions dans lesquelles sont prises ces structures. À travers plusieurs exemples et son expérience il nous montre aussi comment les notions de « pouvoir d’agir », de « community organizing » viennent inspirer et renouveler les pratiques.

Article de la revue Mouvements, disponible en ligne en cliquant ici (CAIRN, 3 euros)

Article – Community organizing, pansement aux politiques néolibérales ou révolution lente ?

Par Hélène Balazard, Robert Fisher - Mouvements, 2016

Au Royaume-Uni, le programme conservateur de la Big Society mis en place par le précédent gouvernement Cameron (2010-2015) et Citizens UK, une community organization suivant le modèle initié par Alinsky, ont en commun une rhétorique de responsabilisation des « communautés » (communities). Les citoyens doivent être capables de s’ « organiser » pour résoudre les problèmes rencontrés. Cette rhétorique est ambivalente et ces deux démarches peuvent tout autant être interprétées comme un pansement accompagnant les politiques néolibérales que comme un pas vers l’émancipation des classes populaires.

Article de la revue Mouvements, disponible en ligne en cliquant ici (CAIRN, 3 euros)

Article – Améliorer le quartier ou changer la société ? À propos de deux expériences contrastées de community organizing à l’échelle californienne

Par Julien Talpin – Mouvements, 2016

L’histoire du community organizing est pleine de récits héroïques et de victoires improbables. Pourtant, plus de soixante-dix ans après son émergence, les inégalités sont plus fortes que jamais aux États-Unis et la pauvreté n’a jamais été aussi importante. En se concentrant sur des campagnes gagnables, les organisations communautaires ne laissent-elles pas de côté les questions plus structurelles, à l’origine de la marginalisation sociale des habitants des quartiers populaires ? Ne sont-elles pas d’énièmes agents de la paix sociale, améliorant à la marge le sort des plus déshérités sans le transformer en profondeur ? Ces interrogations conduisent surtout à mettre en cause le localisme qui a parfois caractérisé le community organizing. Les deux campagnes présentées dans cet article indiquent de quelle façon de vastes coalitions se structurent au-delà de l’échelle locale pour s’attaquer à certains enjeux structurants. Un dilemme semble pourtant apparaître : la prise de distance avec le localisme s’accompagne également d’une plus faible prise des participants sur le devenir des revendications. Faudrait-il faire l’économie de la démocratie pour exercer un réel pouvoir ?

Article de la revue Mouvements, disponible en ligne en cliquant ici (CAIRN, 3 euros)

Article – La profession de « Community organizer au Royaume-Uni, de London Citizens à la Big Society

Par Hélène Balazard - Communication Journée doctorale 2011 du GIS démocratie et participation, 2011

London Citizens est une «Broad Based Community Organisation» alliant des institutions religieuses, universités, écoles, syndicats et groupes communautaires à travers Londres. Depuis 1996, elle organise des campagnes dans différents domaines comme le logement, l'emploi, la pauvreté, la sécurité, l'environnement et l'immigration. London Citizens est progressivement reconnue comme un acteur de la gouvernance de Londres, voire du pays. Mais depuis notamment la campagne et l'élection de Barack Obama, qui a commencé sa carrière politique comme organisateur des communautés à Chicago, le label « community organizing » attire les convoitises. En 2010, un élément clé du programme de David Cameron intitulé « Big Society » est la formation de « community organizers ». Cette communication interroge la publicisation de la profession de « community organizer » au Royaume Uni. Elle étudiera l'interaction entre London Citizens et le programme de la Big Society.

Article disponible en PDF en cliquant ici

Thèse – No shortcut, the case of organizing

Par McAlevey, Jane Frances – CUNY Academic Works, 2015

En anglais

Cette thèse explore comment les travailleurs ordinaires dans la nouvelle économie créent et soutiennent le pouvoir d’en bas. En milieu de travail et dans les mouvements communautaires, il a été démontré que les individus agissant collectivement gagnent des victoires en utilisant une variété d’approches différentes. Ici sera utilisé un cadre de trois grands types de processus de changement : la défense des intérêts, la mobilisation et l’organisation, même si l'accent sera mis sur les deux derniers. La mobilisation et l’organisation sont des approches différentes du changement social qui produisent des résultats différents et des succès relatifs. Cette thèse est l’occasion de passer en revue les principaux arguments de la littérature des mouvements sociaux et des syndicats publiés au cours des quarante dernières années : les années où les mouvements progressifs ont commencé à perdre tout ce qu’ils avaient gagné et l’aile droite a commencé à reconquérir constamment ce que les progressistes avaient perdus.

Plus précisément, cette thèse met à l’épreuve le débat actuel sur les « mouvements sans leader » et l’ « horizontalisme » en se concentrant fortement sur les leaders, y compris qui ils sont, comment ils sont identifiés, comment ils se développent, les choix qu’ils font, et les rôles qu’ils jouent. Les cas étudiés impliquent des travailleurs dont la plupart sont des travailleuses, dans les secteurs de croissance projetés de la main-d’œuvre américaine (soins de santé et éducation) qui sont dominés par les femmes.

Thèse disponible en cliquant ici

Article – Public narrative, collective action and power

Par Marshall Ganz – Accountability through Public Opinion, 2011

En anglais

Cet article se concentre sur la narration publique, définie comme une pratique de leadership qui consiste à traduire les valeurs en action, fondée sur le fait que les valeurs sont vécues émotionnellement. Le narratif est le moyen discursif que les gens utilisent pour accéder à des valeurs qui leur donnent le courage de faire des choix dans des conditions d’incertitude. Le leadership exige de comprendre que même si certaines émotions peuvent nuire à l’action réfléchie, d’autres peuvent l’aider. Les dirigeants font participer les autres à une action délibérée en mobilisant les sentiments qui facilitent l’action pour l’emporter sur les sentiments qui entravent l’action. Les organisations qui manquent d’une histoire manquent d’une identité, d’une culture, de valeurs fondamentales qui peuvent être articulées et approfondies pour motiver.

Disponible en PDF en cliquant ici

Article – La participation citoyenne, Sur les ambiguïtés du « pouvoir d’agir »

Par Clémence Bernardet, Alain Thalineau – Savoir Agir, 2018

Alors que les métiers du travail social, de l’animation socio-culturelle, du développement local, de la démocratie participative s’interrogent sur leurs postures pour « faire participer », le thème du « développement du pouvoir d’agir » monte en puissance. Il s’agit d’accompagner les personnes dans une transformation d’elles-mêmes, afin qu’elles puissent avoir prise sur ce qui les concerne. Une ambition fortement émancipatrice, mais qui peut s’avérer glissante si on se limite à changer les individus, faute de pouvoir (ou vouloir ?) changer la société qui les exclue / opprime / exploite.

Un article qui pose deux questions. Celle de la place de l’action collective et de l’ambition de transformer les rapports sociaux structurels. Et celle, posée aux professionnel-les : ne serions-nous pas en train de transférer sur le public dont nous avons la charge, l’injonction à changer que nous ne sommes nous-mêmes pas capables de réaliser ?

Article disponible en ligne en cliquant ici

Article – Saul Alinsky, mythes et réalités

Par Contretemps, revue de critique communiste – 2018

Revenant sur les méthodes du community organizing qui ont le vent en poupe, la revue de critique communiste Contretemps s’interroge sur la capacité du CO à transformer la gauche radicale et à reconstruire durablement des organisations implantées dans les classes populaires.

Cet article souhaite clarifier un certain nombre de points concernant Saul Alinsky, afin de mieux comprendre le contexte d’apparition des méthodes de community organizing. De son rapport avec la gauche, avec les médias ou avec la sociologie, l’auteur propose ici de déconstruire un certain nombre de « mythes » qui se sont cristallisés autour de la figure d’Alinsky au fil des années.

Disponible en PDF en cliquant ici

Article – Livrer la bataille des idées depuis les cages d’escalier

Par Marielle Benchehboune, Laurent Moity, Yoan Pinaud, Adrien Roux et Julien Talpin - Contretemps, revue de critique communiste - 2018

Cet article rappelle les principes du community organizing au sens entendu par Saul Alinsky et appliqués par l’Alliance Citoyenne, et s’interroge sur l’impact des « petites victoires » a plus grande échelle. Dans ces alliances citoyennes, il apparaît difficile de prendre de la distance afin d’inscrire ces initiatives dans des luttes plus globales et donc des projets de plus long terme. Le pouvoir de qui ? le pouvoir de quoi ?

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Article – Saul Alinsky, le conflit et la communauté à la source de l’intégration démocratique

Par Thierry Quinqueton – Vie Sociale, 2012

Cet article a pour but de faire connaître Saul Alinsky, qui reste peu connu en France. Il rappelle sa biographie, ses objectifs et les tactiques qui l’ont rendu célèbre outre-Atlantique et aborde deux questions : La première concerne l’utilisation du conflit par Alinsky, utilisation qui a généré la critique majeure dans le monde anglo-saxon ; la seconde est celle de la place de la « communauté » dans ses propositions d’organisation, question qui est à la source de l’incompréhension dont il est victime en France.

Disponible en cliquant ici

Film – Construire des actions collectives avec le community organizing

Par GSARA asbl

Mis en place et théorisé à partir de la fin des années 1930 par Saul Alinsky, le community organizing vient des USA. Dans l’optique de développer des contre-pouvoirs populaires, le community organizing est une méthode d’action et d’organisation collective qui prend pour point de départ les dominations et les injustices vécues matériellement par les gens, afin de poursuivre trois objectifs : obtenir des améliorations dans les conditions de vie, dépasser un sentiment de fatalité et une exclusion politique réelle, construire un rapport de force par l’organisation collective de celles et ceux dont le seul pouvoir est leur nombre.

En France, ces méthodes se développent depuis la fin des années 2000, selon différents modes. En 2017, pour la première fois en Belgique, des acteurs sociaux (animateurs socioculturels, éducateurs, assistants sociaux) ont suivi une formation aux techniques du community organizing. En les suivant dans cette formation le GSARA a voulu mettre en lumière comment ces techniques redonnent du sens et de la valeur à l'action sociale.

Disponible en ligne en cliquant ici

Livre – L’empowerment, une pratique émancipatrice

Marie-Hélène Bacqué et Carole Biewener – La Découverte, 2015

Attention, livre important pour celles et ceux qui questionnent l'incapacité des politiques et des experts à répondre aux défis de notre époque troublée. Et qui s'interrogent sur la façon dont les citoyen(ne)s peuvent construire des alternatives. Ce questionnement est en effet à l'origine, dans les États-Unis d'après-guerre, du concept d'empowerment, désignant le «pouvoir d'agir» des individus et des collectifs. Ce concept a connu depuis un succès planétaire dans le monde anglophone. Mais il n'a percé que plus récemment dans les autres espaces culturels, dans les milieux du travail social comme dans la littérature du management. D'où l'utilité de ce livre très pédagogique, qui synthétise la foisonnante littérature anglophone sur la notion d'empowerment. Il retrace sa genèse, l'histoire de ses multiples variantes - conservatrices ou progressistes - et celle des pratiques sociales qu'elles ont nourries. Des mouvements féministes du Nord et du Sud jusqu'aux programmes de la Banque mondiale et de l'ONU, la notion est utilisée aussi bien dans une perspective radicale d'émancipation que pour conforter les visions néolibérales ou social-libérales. Défendant résolument sa version émancipatrice, les auteures en expliquent les limites, mais aussi l'importance pour éclairer les débats contemporains sur la démocratie.

Disponible en librairie

Etude – Is a community land trust the best model for achieving your organization’s goals ? Community Land Trust performance in different housing markets

Etude – Is a community land trust the best model for achieving your organization’s goals ?

Community Land Trust performance in different housing markets

Cette étude a été réalisée en analysant 3 expériences de Community Land Trust de différentes tailles : Madison, Boston et Burlington. L’objectif est d’aider les organisations civiles et les pouvoirs publics locaux à tenir compte de l’utilisation potentielle du modèle de Community Land Trust pour la création de logements accessibles et travailler au (re)développement local. Les études de cas montrent comment le CLT a été utilisé dans les régions où le coût du logement a considérablement augmenté. Le rapport fournit également des exemples de l’utilisation de CLT pour faciliter le développement local.

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